Publié le 03/03/2016 - 13:13
Sur l'autoroute 10 à six heures du matin, la poudrerie souffle et balaye le bitume. C'est enneigé pour rejoindre l'autobus qui me mènera en ville. Je me suis levé tôt – quatre heures – mais je me dis que c'est tard pour ces boulangers que nous allons rencontrer aujourd'hui.
Pour faire découvrir aux étudiants et étudiantes du groupe de recherche-création Récit Nomade, j'ai voulu les guider d'une boulangerie à l'autre, à Montréal. L'écriture, le voyage et le pain sont pour moi trois points de référence qui font naitre une symétrie dans ma vie. Quoi de mieux pour transmettre une passion que de mettre le corps et l'esprit en mouvement, et faire un voyage près de chez soi.
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Sur la rue Drolet, entre Jean-Talon et de Castelnau, le vent hivernal s'engouffre entre les escaliers abrupts de Villeray. Je reçois de plein fouet, sur le front, une vague glaciale en même temps que les arômes de la cuisson des pains m'enivrent à mi-parcours. À la première intersection, rue Drolet et de Castelnau, la boulangerie Le Pain dans les voiles accueille la tribu urbaine matinale, café aux lèvres et clavier numérique au bout des doigts – à moins que ce ne soit un journal, mais c'est plus rare. Sur les longues tables face aux fenêtres, des tablettes électroniques sont disponibles pour ceux et celles qui auraient eu l'audace de partir sans leur propre appareil. Le pain et le café, certes, mais pourquoi les pixels? Les créatifs culturels, hipsters et autres bobos se sont donnés rendez-vous, tout comme les gens ordinaires et les jeunes familles du quartier. Notre groupe de plus d'une quinzaine d'étudiants occupe la grande table principale.
Martin Falardeau nous reçoit. Cofondateur et copropriétaire du Pain dans les voiles, il a travaillé en cuisine dans les années 1990 et s'est ensuite formé comme boulanger en compagnie de Benoit Fradette, au Fromentier de la rue Fabre. C'était en pleine nuit, après un quart de travail au Toqué!, que Martin Falardeau avait cogné à la vitrine de la boulangerie occupée à son travail nocturne. Il avait demandé à Benoit Fradette s'il pouvait voir comment travaillaient les boulangers et celui-ci lui avait répondu qu'il était le bienvenu, pourvu qu'il mît la main à la pâte. Une nouvelle vocation était née.
Martin Falardeau ouvrit ensuite sa propre boulangerie à Ottoburn Park, La Femme et le boulanger, qu'il a vendu quatre ans plus tard pour reprendre son souffle. François Tardif, un ami de longue date et partenaire de voile, lui proposa quelques années plus tard de créer une nouvelle boulangerie. Martin Falardeau s'était dit qu'il pouvait être consultant, pour ne plus se remettre dans le pétrin, mais finit par embarquer complètement dans le projet. Le Pain dans les voiles est né d'une passion et d'une connaissance fine de la panification et du mode de vie d'une boulangerie. C'est ainsi qu'en alliant entrepreneuriat et science, les deux partenaires mirent sur pied une boulangerie où le travail diurne est à l'honneur grâce à de longues fermentations de pâte au froid.
«Nous avons choisi tout d'abord le type de pain que nous voulions obtenir, dit Martin Falardeau, et ensuite nous avons fait le parcours inverse pour établir les manières de faire ce pain.» À La Femme et le boulanger, l'expérience avait été différente: durant quatre années, le boulanger avait dû investir toujours plus de temps de travail pour compenser les limites technologiques (four, réfrigération) qu'il ne pouvait dépasser. Cela l'avait épuisé.
L'innovation et la clé de cette approche étaient fondées sur la science des blés et des farines. En choisissant le type de blé idéal pour le genre de pain que les boulangers fondateurs souhaitaient accomplir, ils établirent un réseau de liens avec des agriculteurs québécois et une minoterie régionale. C'est ainsi qu'aujourd'hui, la majorité des pains du Pain dans les voiles est fabriquée à partir de farines issues de blés québécois et moulues par les Moulins de Soulanges, en Montérégie. Les blés sont issus de l'Agriculture raisonnée (une marque de commerce déposée des Moulins de Soulanges), ce qui signifie que pour cultiver ces blés aucun pesticide n'a été employé. Le cahier des charges est élaboré dans ce cas-ci par l'entreprise elle-même, en comparaison des cahiers des charges des organismes de certification biologique qui eux sont élaborés indépendamment des entreprises. L'avantage de l'Agriculture raisonnée réside toutefois dans son accessibilité pour des agriculteurs fort habitués à l'agriculture conventionnelle employant de nombreux intrants chimiques. Robert Beauchemin, fondateur et directeur des Moulins de Soulange, disait en entrevue à Radio-Canada, que c'est grâce au modèle médian de l'Agriculture raisonnée que des agriculteurs ont modifié leurs habitudes d'agriculture et que certains d'entre eux sont même passés au biologique.
En achetant toutes les récoltes de blé, le Pain dans les voiles s'offre un blé dont il connait les propriétés et qui sera constant toute l'année. Cela permet alors de miser sur la qualité du produit fini et d'encourager un circuit relativement court de production et de transformation (cette filière blé-farine-pain est entièrement québécoise). Pour Martin Falardeau, il est beaucoup plus valorisant en tant que boulanger de panifier avec des blés québécois qu'avec des blés biologiques provenant des prairies canadiennes, voire de l'étranger.
Pour la baguette tradition, les boulangers font une exception et utilisent une farine d'origine française, laquelle permet de développer une fermentation au levain idéale (sans arrière-goût aigre, spécifie Martin Falardeau) et d'obtenir un contraste mie-croûte à leur goût. Cette baguette affiche un alvéolage irrégulier, une mie avec de grandes bulles qui se mâche agréablement. Les arômes de la mie et de la croûte se dévoilent progressivement, sans provoquer une attaque au palais. Mais les flaveurs persistent longtemps après la dernière bouchée. La croûte craque mais n'a pas à être déchirée. C'est un pain blanc, certes, mais il réconforte.
Le voilier que les partenaires du Pain dans la voile construisaient a coulé avant son premier voyage. De nouveaux voiliers sont en chantier. À l'origine du Pain dans les voiles, une passion pour la voile et la quête d'un métier qui permettrait à ses artisans de lever les voiles. Faire du pain pour créer un mode de vie.
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Au marché Jean-Talon, à quelques minutes de marche de notre première destination, Caroline Rolland nous accueille à la boulangerie Première Moisson. Au service de l'entreprise depuis seize ans, Caroline Rolland a tout d'abord commencé au comptoir durant ses études universitaires en architecture du paysage. Diplôme en poche, elle a réalisé que sa place était auprès de la clientèle, au sein de cette boulangerie artisanale d'une grande capacité de production .
Première Moisson est née en 1992 à l'initiative de Liliane Colpron et de ses proches. D'une première succursale à Dorion, l'entreprise a grandi et développé dix-huit boulangeries dans la région de Montréal. Chacune de ces boulangeries prépare et cuit son propre pain, au sein d'une structure où chaque patron propriétaire gère à parts égales son commerce avec la direction de Première Moisson. Les autres produits préparés, comme les viennoiseries, sont produits dans des usines centralisées qui distribuent dans tout le réseau afin d'assurer une facilité de production (grâce à la congélation) et une fiabilité sur le plan de la qualité.
Au four, Rémi, un boulanger vagabond d'origine française, nous raconte comment son parcours l'amène à explorer le monde de la boulangerie hors de la France. Dans la mi-vingtaine, il a l'énergie de l'apprenti et accepte de se remettre en question face à des techniques, mais surtout des ingrédients, différents. «C'est possible de développer son toucher et d'acquérir une certaine facilité et une intuition quand on est dans une même boulangerie après plusieurs années. Mais il suffit d'aller travailler ailleurs pour devoir tout réapprendre», nous confie ce boulanger qui souhaite ouvrir un jour sa propre boulangerie.
À la croisée des modes de production artisanale et industrielle, Première Moisson mise pour ses pains une qualité qui honore la tradition et l'innovation. Sous le slogan «L'Art du vrai», elle présente à sa clientèle tout ce dont celle-ci pourrait avoir besoin pour se constituer un bon repas, incluant le pain et ses condiments. Sur l'étalage des pains, les croûtes dorées des baguettes côtoient la douzaine de variétés de pains complets et spéciaux. Le pain complet sur levain naturel que nous dégustons se veut à la fois léger et parfumé d'un arôme riche de grains.
Il est commun d'entendre que les boulangers, mais surtout leurs vendeuses et conseillères (car ce sont souvent des femmes), doivent éduquer les clients au sujet du pain. «Il m'arrive, dit Caroline Rolland, de devoir répondre à un client qu'un pain n'est pas brûlé, mais qu'il est tout simplement bien cuit.» Fait intéressant, souligne par ailleurs Caroline Rolland, la baguette se consomme comme un produit de luxe au Québec, alors qu'en France elle est considérée comme le pain quotidien, acheté et renouvelé chaque jour.
Comme le Pain dans les voiles, Première Moisson emploie les farines des Moulins de Soulange et affiche clairement derrière le comptoir son parti pris pour le circuit court blé-farine-pain promu par l'Agriculture raisonnée. Ayant joué un rôle dans la mise sur pied des Moulins de Soulange, Première Moisson a exercé un effet de levier important que des boulangers artisanaux de plus petite envergure n'auraient pu exercer seuls. Les nombreuses boulangeries artisanales du Québec qui utilisent aujourd'hui les farines des Moulins de Soulange, incluant le mélange Pain dans les voiles, sont ainsi liés d'une certaine manière à l'agriculture et la minoterie d'envergure «industrialo-artisanale».
«Les gens vont chez Première Moisson, et non chez Première Moisson du Plateau Mont-Royal ou du marché Jean-Talon. Il faut donc qu'il y ait une uniformité. Mais nous avons une capacité de production et de vente qui facilite les expérimentations de pain à grande échelle», précise Caroline Rolland. La passion de cette gérante au service d'une entreprise effervescente nous aura convaincus que le monde de la boulangerie artisanale au Québec dépend des initiatives des plus grands comme des plus petits. Il est bien plus complexe qu'il n'y parait de tracer la frontière entre le monde artisanal et le monde industriel de la boulangerie.
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Face au marché Jean-Talon, à un jet de pierre de Première Moisson, Daniel Jobin alias Joe la Croûte, boulange en direct (c'est-à-dire du pétrin au four sans faire appel au froid pour retarder la fermentation des pâtes) pour produire le type de pain qu'il affectionne (grands pains inspirés de mélanges créatifs, baguettes et autres pains blancs légers comme des nuages, ainsi que des pains spéciaux variés). Autrefois, Daniel Jobin a été un pilier important au comptoir de la boulangerie Le Fromentier, au côté de Benoit Fradette. C'est d'ailleurs auprès de ce dernier qu'il est allé se former à Aix-en-Provence. Au retour de son apprentissage, il a mis sur pied la boulangerie Joe la Croûte.
Lors de notre passage, j'ai renoué contact avec Dominique avec qui j'avais travaillé au Fromentier dans les années 2000. Elle incarne le rôle important que jouent les vendeuses et les conseillères du pain aux comptoirs des boulangeries artisanales. Sans elles, les pains qui se vendent n'auraient plus d'histoires à raconter. Comme Caroline Rolland, Dominique a commencé son boulot au comptoir des boulangeries pour payer ses études. Puisqu'elle aimait l'emploi, les gens et le pain, elle est restée dans le milieu. Sa connaissance des pains ainsi que son enthousiasme provoquent un intérêt pour le bon pain. «Les gens sont heureux quand ils viennent ici chercher leurs pains», dit-elle. C'est ce plaisir renouvelé jour après jour qui doit être nourri et garder vivant.
Au repos lors de notre passage, Daniel Jobin m'avait confié auparavant qu'il est exigeant de maintenir une petite équipe pour ne pas s'engager dans une gestion plus complexe. La question est ainsi de trouver l'équilibre entre le pétrin et le four, d'une part, et la vie au-dehors du fournil, d'autre part.
Aux murs rouges de la boutique sont affichées des images de pains anthropomorphisés. L'un s'exclame «Pousse-toi la mie. Je suis cool, Joe Cool», alors qu'un autre rappelle qu'il n'y a «Nul pain sans peine». Dans cette boulangerie d'une échelle modeste, pourtant très bien équipée technologiquement, j'ai ressenti cette proximité entre ces trois acteurs centraux de toute vie panivore: le boulanger, ses vendeuses et les clients. Comme quoi l'expérience authentique d'un commerce de boulangerie ne peut faire abstraction de l'interdépendance entre ces trois acteurs aux mains desquels le pain voyage.
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Lors de la pause du lunch, nous nous arrêtons chez Isabelle et nous rassemblons autour d'une dizaine de pains récoltés au passage dans les boulangeries de notre circuit. Nous abordons des questions d'ordre sociologique, comme: «Comment parler d'authenticité aujourd'hui, dans nos rapports avec les autres et en rapport avec des produits artisanaux que nous consommons?» Car nous sommes consommateurs, mais nous aspirons aussi à être ou à devenir plus que cela. Pour moi, cette quête d'authenticité est au cœur de ma démarche de rencontre avec des boulangers de tous horizons. Elle m'inspire à une certaine humilité et nourrit une curiosité intense.
Je me demande pourquoi j'ai voulu baptiser cette tournée des boulangeries «pèlerinage». Je n'adhère pas naturellement au symbolisme classique et religieux du pain, de la fraternité et de l'Eucharistie. Cela me semble bien loin dans mon imaginaire (conscient). Mais le pain – le faire, apprendre à le faire, l'acheter, l'offrir, le savourer avec tous les sens – me pénètre en des zones où je ne peux me résoudre à rationaliser ou intellectualiser mon expérience. C'est comme si je préférais préserver quelque chose d'intact et laisser l'émerveillement m'envoûter. Peut-être est-ce une expérience du «sacré» comme certains l'entendraient.
Le pain est pour moi quelque chose de global, il touche à l'ensemble de l'être, au relationnel et me pousse à un dépassement – à dépasser mes habitudes et surpasser les informations acquises. C'est une manière d'aller vers l'autre pour cocréer en sa compagnie. Faire apparaitre ou émerger ce qui n'est pas encore connu. J'idéalise le pain – mon imaginaire est pétri de rêves panivores – mais je recherche le côté pragmatique et réaliste intrinsèque à la panification. Le pain touche ainsi à tous ces aspects de l'être qui dans d'autres circonstances et conditions me semblent aliénés. Le pain serait-il dès lors une voie parmi d'autres vers la connaissance de soi?
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Au milieu de cet après-midi déjà fort entamé, nous faisons un saut chez Capucine et tournesol où Philippe Sayad défend l'intégralité du pain au levain naturel depuis la fin des années 1980. Les blés sont tous moulus sur place, au moyen de deux moulins artisanaux, et les pains sont fermentés au moyen d'une culture de levain faite d'eau et de farine. Sur l'étalage, les pains au levain cuits dans des moules sont trapus, et témoignent du caractère dense et roboratif des grains intégraux. Quelques variétés de pains sont fabriquées sur levure boulangère. Ici, on ne trouvera pas de gâteries sucrées ou de pains blancs. Les panneaux sur la vitrine l'indiquent très clairement. Mais les plats préparés comme les muffins (sucrés à la compote de pommes) se veulent porteurs d'un gage de santé qui semble être tombé dans l'oubli.
Malgré les campagnes journalistiques sur le «bon pain», Philippe Sayad déplore la «vedettisation» de pains majoritairement blancs. Selon lui, seules des farines intégrales contenant le germe de blé et tout le son sont propices à une alimentation équilibrée en glucides, en protéines et en minéraux. Bien qu'il acquiesce qu'il est de bon aloi de se gâter parfois d'une viennoiserie bien sucrée et beurrée, et d'une baguette blanche, ce boulanger qui se dit lui-même «têtu» pourfend les opinions mal informées que véhiculent les journalistes, voire certains spécialistes de l'alimentation, au sujet du pain. Comme quoi il est grand temps qu'une médiatisation plus juste sur le pain voie le jour au Québec.
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Nous quittons Outremont et entrons dans le Mile-End où, sur la rue Saint-Viateur, nous entrons dans la Maison du bagel. Il se produit ici des centaines, voire des milliers, de douzaines de bagels et cela depuis 1957. Robert, d'origine italienne, fait partie de la troisième génération de patrons. Son père avait acquis la Maison du bagel de son fondateur, Myer Lewkowicz. Dès l'âge de onze ans, Robert avait mis les pieds dans le fournil et les mains à la pâte, occupant tour à tour toutes les fonctions au sein de l'entreprise.
Durant notre passage, un boulanger s'occupait à diviser et façonner les bagels à partir d'une pâte très ferme de plusieurs dizaines de kilogrammes. Un autre boulanger s'affairait à enfourner et défourner les bagels, alors qu'au comptoir les bagels chauds enrobés de graines de sésame ou de pavot s'envolaient par douzaines. D'un geste sec et précis, il sortait un rang de bagels à la fois du four, et projetait ceux-ci sur une sorte de toboggan où les bagels glissaient lentement vers le comptoir de caisse.
La renommée des bagels de Montréal semble acquise (face à l'adversaire de New York), mais Robert s'exclame que tous les jours le combat doit être repris. Je lui ai demandé s'il y avait une certaine solidarité entre les deux plus grands producteurs de bagels de Montréal (l'autre était situé sur Fairmount à environ deux cents mètres de distance). «Ne prononce pas le F… word!», nous a-t-il répondu tout de go. Il ajouta cependant qu'il se souviendra toujours de la journée où le patron chez Fairmount l'avait appelé pour lui demander une dizaine de sacs de farine. Inhabitué à ce type de sollicitation, il hésita. Mais son père lui dit d'acquiescer à la demande du compétiteur qui, peu de temps après, vint chercher plusieurs sacs de farine.
Les bagels de Montréal sont une institution d'origine juive qui est devenue transculturelle. Les boulangers employés étaient tous d'origines diverses. Au plan de travail, au four ou au comptoir, j'ai eu l'impression de voir des boulangers usés par le labeur. Leurs regards un peu lointains et leur enthousiasme confiné contrastaient avec le charisme du patron au profil sanguin. En mâchant un bagel tout juste sorti du four, je me suis rappelé que certaines traditions se doivent de ne pas (trop) changer ou innover. En tout cas, la tradition du bagel montréalais peut compter sur quelques institutions solides qui savent répéter une formule qui connait du succès.
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Devant la boulangerie Guillaume, en plein sur la Main, notre groupe se sous-divise afin d'entrer dans la boutique de quelques mètres carrés. Dans cette boulangerie au style industriel, mais où se fait (beaucoup) de pains artisanaux, ce sont des jeunes qui mènent le bateau. Le boulanger propriétaire, Guillaume Vaillant, a mis sur pied une culture boulangère reflétant les élans actuels de la culture des jeunes de vingt et trente ans. À la caisse, la vendeuse me confirme que l'employé le plus âgé est trentenaire. Les étalages débordent de pains de toutes les variétés ainsi que de viennoiseries. Notre passage impromptu dans la boulangerie suscite la curiosité des clients qui se fraient un chemin parmi nous jusqu'à la caisse.
Il est déjà tard en cette fin d'après-midi et je n'ai le temps que d'attraper un café et une baguette avant de saluer les étudiants qui quittent pour vaquer à leurs propres occupations. Cette boulangerie mériterait une rencontre plus approfondie avec ses artisans, tout comme d'autres boulangeries montréalaises mériteraient un détour et des rencontres.
Des tournées des boulangeries de Montréal sont possibles dans plusieurs quartiers, mais surtout selon des cultures et des goûts fort variés. L'histoire du pain, ses techniques, ses artisans, ses visionnaires et ses consommateurs peuvent ainsi se donner rendez-vous à la croisée des différents imaginaires du pain. Tout cela est au seuil de notre porte.
Photo: François Thibeault