Publié le 02/23/2016 - 22:28
Le qualificatif moldu m’a été attribué par une connaissance adepte de spiritualité et persuadée que le monde envoie des signaux à ceux qui y sont attentifs. Je crois que la désignation lui a échappé quand j’ai refusé qu'elle utilise le tarot amérindien pour régler mes problèmes de coeur. Le terme moldu provient de l’univers d’Harry Potter, c’est le mot qu’utilisent les sorciers pour parler des humains qui n’ont pas de pouvoirs magiques.
Assise sur un coussin, dans un cercle de paroles où flottait un nuage de fumée de sauge, j’ai compris que cette connaissance avait raison. Partout où je regardais, je voyais des visages se crisper pour retenir des larmes. Le bâton de paroles circulait de mains en mains, permettant à pratiquement toutes les personnes présentes dans la pièce d’entrer dans une petite transe au cours de laquelle elles laissaient tomber tous leurs filtres. C’était l’équivalent psychologique de l’exercice de confiance où, les yeux fermés, un individu se laisse tomber, vulnérable, dans les bras d’un groupe qu’il connaît à peine et qui pourtant le rattrape.
Tandis que mes voisins et bien d’autres semblaient vivre une expérience quasi mystique en agrippant le bâton de paroles, j’ai constaté, déçue, qu’il ne produisait absolument rien entre mes mains. L’objet magique, qui avait délié une vingtaine de langues et apaisé une vingtaine de cœurs, était redevenu un bout de bois mort à mon contact.
J’ai apprécié la beauté de la scène, mais je l’ai fait de l’extérieur ; un peu en retrait. Comme une moldu contemplant cette magnifique facette de la vie à laquelle son cerveau légèrement trop rationnel ne lui donne pas accès.
Photo : creative commons