Publié le 10/11/2015 - 17:46
L'aube a la même teinte rouge sang quel que soit le lieu qui accueille mes lambeaux de sommeil.
Même au terme du voyage sur l'île gracieuse et lumineuse qui, selon moi, aurait pu m'accueillir dans la marche normale du temps.
Je m'y suis pourtant résignée à vivre différemment en y admirant certaines des aubes les plus splendides qu'il m'ait été donné d'admirer.
Je me suis toujours sentie étrange d'affectionner ce moment trouble où s'agitent les limbes de la nuit qui ne veulent pas se diluer dans la clarté du jour.
Pourtant, je vis et je respire mieux quand l'aube m'enferme dans sa bulle froide.
Je me délecte des changements de couleur qui ponctuent l'éveil de la lumière.
J'observe le ciel qui semble s'offrir à moi car je suis l'une des rares à l'observer.
L'aube m'apparaît comme un moment de sacrifice ; il dévore les démons de la nuit pour en purger le monde.
Je sais que ces créatures ne disparaissent jamais car leurs cendres retombent sur les mortels qui ont l'imprudence de vivre à contre-courant.
Je les accepte en moi désormais.
L'aube me permet de me sentir connectée à un aspect particulier de ce monde où j'ai longtemps douté trouver une place.
Ce moment de flottement est mon allié désormais ; il fait écho à ce qu'il peut y avoir de trouble et de lumineux en moi.
L'aube peut représenter un monde absent où rien ne vit alors que rien n'est plus harmonieux, naturel et fabuleux que l'aube. Elle est mort de la nuit, transition, ouverture au jour et le moment le plus poétique, solitaire et beau d'un jour passé sur terre.
Vivre intensément à l'aube est transgressif car j'y affirme ma singularité irréductible ; cet état d'esprit est indissociable de tout processus créateur. Il faut se penser autre pour envisager des altérités à décrire et à décortiquer.
L'aube me décentre de moi-même en me faisant vivre à un rythme singulier et étrange. Elle m'invite à des voyages intérieurs qui correspondent à mon tempérament et je sais que son souffle glacé ne me fera plus jamais frissonner ; le froid de l'aube me regénère et me fait entrer dans des mondes intensément riches, inaccessibles à d'autres moments de la journée.